La contraception d’urgence existe en Amérique du Nord depuis plus de vingt ans. Souvent désignée pilule du lendemain, la contraception d’urgence représente un moyen efficace de prévenir une grossesse après une relation non protégée. Malgré tout, de nombreuses adolescentes n’en connaissent pas l’existence ou ne savent pas comment l’obtenir. Le terme pilule du lendemain devrait cependant être évité puisqu’il est erroné. En effet, des jeunes femmes risquent de ne pas demander de contraception d’urgence parce qu’elles pensent qu’il est trop tard. Puisque aucune méthode de contraception d’urgence ne fonctionne si la nidation a déjà eu lieu, ces méthodes ne doivent pas être considérées comme abortives.
La méthode la plus utilisée se nomme méthode Yuzpe (1) et fait appel à de fortes doses d’œstroprogestatifs. On postule que la contraception hormonale d’urgence fonctionne en empêchant la nidation de l’ovule fertilisé par la modification de l’endomètre (2), le retard de l’ovulation ou la prévention de la fonction du corps jaune (3). Les études révèlent toute l’efficacité de la contraception hormonale d’urgence (4). De fait, sans intervention, huit femmes sur 100 deviennent enceintes après une seule relation sexuelle non protégée pendant les deux semaines du milieu du cycle menstruel. Grâce à la contraception d’urgence, seulement deux femmes sur 100 deviennent enceintes.
Les jeunes filles qui ont eu leurs premières règles et qui ont eu une relation sexuelle non protégée consensuelle ou non consensuelle peuvent recevoir une contraception d’urgence (tableau 1). Elles peuvent y recourir si elles ne présentent pas d’antécédents d’accident cérébrovasculaire, de tumeur sensible aux œstrogènes ou de thrombophlébite, de maladie hépatique chronique ou d’hypertension non traitée.
Tableau 1 : Les relations sexuelles non protégées et leurs équivalents |
- Relation sexuelle non protégée |
- Éjaculation sur les organes génitaux |
- Coït interrompu |
- Bris de condom |
- Expulsion du stérilet ou retrait à la moitié du cycle |
- Spermicide seulement à la moitié du cycle |
- Oubli de plus de trois anovulants ou retard de plus de deux jours à reprendre les anovulants |
- Oubli de la mini-pilule dans les 48 heures |
- Agression sexuelle (sauf si la victime prend un anovulant) |
- Condom seulement ou spermicide seulement accompagné d’une exposition récente à un tératogène |
Si les œstrogènes sont contre-indiqués (un cas rare chez les adolescentes), on peut envisager des comprimés ne contenant que de la progestine, Un stérilet de cuivre constitue aussi un mode de contraception d’urgence très efficace dans les 120 heures suivant une relation sexuelle. Cependant, on ne peut généralement pas obtenir de stérilet au cabinet du pédiatre ou au département d’urgence. Si le stérilet semble représenter la seule solution, il faut envisager une antibiothérapie prophylactique contre la blennorragie et la chlamydia. On peut retirer le stérilet pendant ou après les règles suivantes.
La contraception d’urgence peut être utilisée en tout temps pendant le cycle menstruel. La plupart des recherches portent sur une contraception d’urgence dans les 72 heures suivant la relation sexuelle, mais on suppose qu’elle pourrait être efficace jusqu’à cinq jours après une relation. (5). Une jeune femme qui se présente trois jours après une relation sexuelle peut donc recevoir une contraception d’urgence puisqu’elle la prendra moins de 120 heures après la relation, mais il convient alors de l’informer de la diminution de l’efficacité. Il est démontré que le moment de la première dose (dans les trois premiers jours) n’a pas à être fixe (6).
Les pédiatres, les médecins de famille et les autres personnes qui s’occupent d’adolescents devraient envisager de posséder des anovulants d’urgence (AU) en cabinet (tableau 2). En effet, certaines adolescentes sont gênées de faire exécuter leur ordonnance ou trouvent trop éprouvant de se présenter à la fois au cabinet du médecin et à la pharmacie.
Tableau 2 : Le contenu des ensembles d’anovulants d’urgence |
- Deux enveloppes contenant deux comprimés de norgestrel-éthinylœstradiol (Ovral, Wyeth Ayerst) et un antiémétique |
- Feuille d’information |
- Numéro auquel téléphoner en cas d’inquiétudes |
- Fiche de rendez-vous pour le suivi |
La posologie la plus courante de la contraception d’urgence consiste à prendre deux comprimés de norgestrel-éthinylœstradiol (Ovral, Wyeth Ayerst) dont la première dose est administrée avec 50 mg de dimenhydrinate. La dose totale est reprise 12 heures plus tard. Il importe de prendre cette seconde dose à l’heure. Pour des raisons d’ordre pratique, on peut même retarder le moment de prendre les comprimés pour que les deux doses soient prises pendant les heures normales d’éveil. Si l’adolescente omet la deuxième dose, il lui faudra reprendre toute la posologie. S’il est impossible d’obtenir du norgestrel-éthinylœstradiol, le médecin peut prescrire des doses de quatre anovulants plus faibles, soit du norgestimate-éthinylœstradiol (Cyclen, Janssen-Ortho, ou TriCyclen, Janssen-Ortho [comprimés bleu foncé seulement]) ou du lévonorgestrol-éthynilœstradiol (Triphasil, Wyeth-Ayerst [comprimés jaunes seulement]). Cependant, ces médicaments n’ont pas été évalués dans le cadre d’études cliniques.
Les adolescentes peuvent se présenter uniquement pour obtenir une contraception d’urgence, ou le médecin peut en découvrir le besoin pendant son évaluation normale. De toute façon, celui-ci doit demander à l’adolescente la date et la nature de son dernier cycle menstruel et le moment de la relation sexuelle depuis le début du cycle. Il lui faut aussi s’informer de ses antécédents d’utilisation de contraception et de contre-indication aux contraceptifs oraux. L’examen physique doit inclure la prise de la tension artérielle. L’examen gynécologique est indiqué si les dernières règles étaient inhabituelles et que le médecin présume une grossesse, s’inquiète de la possibilité d’une maladie transmise sexuellement ou envisage l’insertion d’un stérilet. En cas d’examen gynécologique, le médecin doit prélever des échantillons afin de faire procéder à des cultures de chlamydia et de blennorragie.
La discussion avec l’adolescenteAprès avoir établi si la contraception d’urgence est indiquée, le médecin explique la méthode à l’adolescente et la possibilité d’échec. Il lui précise que les prochaines règles peuvent être rapprochées, à temps ou retardées et lui fait part des possibilités qui s’offrent à elle si elle devient enceinte. Si elle compte avoir des relations sexuelles avant ses prochaines règles, le médecin lui recommande d’utiliser une méthode contraceptive de barrière, accompagnée d’un spermicide. Si l’adolescente emploie une contraception d’urgence parce qu’elle a oublié de prendre des anovulants, elle peut commencer une nouvelle série d’anovulants le dimanche suivant la contraception d’urgence. Puisque la contraception d’urgence n’est pas entièrement efficace, le suivi est important. Le médecin doit conseiller à l’adolescente de venir subir un test de grossesse si ses prochaines règles sont plus d’une semaine en retard ou si elles sont le moindrement inhabituelles. Elle doit également revenir si elle souffre de saignements abondants ou de douleurs. Il est possible de fixer un rendez-vous une semaine après la date prévue des prochaines règles. Ce rendez-vous représente une excellente occasion de donner des conseils à l’adolescente au sujet de son activité sexuelle, de la contraception, des maladies transmises sexuellement et de relations sexuelles plus sécuritaires. Le médecin peut féliciter l’adolescente d’être venue demander une contraception d’urgence et lui suggérer d’envisager une autre méthode pour prévenir une grossesse. Si elle choisit un anovulant, le médecin peut le lui remettre, lui donner des condoms et accompagner le tout d’explications.
La contraception d’urgence représente un moyen efficace de prévenir une grossesse après une relation non protégée. Les pédiatres et les médecins de famille devraient disposer d’anovulants d’urgence en cabinet afin de les remettre aux adolescentes risquant une grossesse non désirée.